Rayon de lune

La lune devait être pleine, des filets de lumière blanche filtraient par la petite fenêtre barrée de métal. Des lucioles de poussière dansaient avec un calme reposant. Pourtant, elle ne parvenait pas à fermer les yeux. Le froid la saisissait et la couverture qui recouvrait son corps ne la réchauffait pas suffisamment pour que ses membres cessent de trembler. Elle quitta un instant le ballet qui se jouait devant elle pour se perdre dans l’étroitesse des murs qui l’entouraient. Incapable de dire combien la pièce mesurait, Moelique avait juste la place de se coucher dans la longueur, et pouvait toucher les murs avec les bras tendus dans la largeur. Un vrai trou de souris.

Un spasme la secoua. Ni larme ni sanglot ne vinrent perturber le calme de sa cellule. Moelique restait figée là, dans son malheur. Les odeurs nauséabondes et les râles des voisins faisaient désormais partie de ce décor. Elle ne s’y était pas vraiment habituée, seulement ils étaient là. Comme les violences et les insultes des soldats, la haine qui l’entourait.

Une seule question la tourmentait : quand sa mort allait-elle venir ? Aucun doute n’était permis. Moelique savait pertinemment comment finissaient ceux qu’ils appelaient désormais les animalheurs. Morts ! Pendus, brûlés, peu importait. Non pas qu’elle acceptait sa mort, bien au contraire. Sa vengeance la rongeait d’un feu toujours plus ardent. Si elle se trouvait dans cette sinistre prison, si son œil, enflé, refusait toujours de s’ouvrir et si ses côtes l’empêchaient de respirer convenablement, c’était à cause d’Alissart. Si sa main l’élançait et si sa blessure à l’épaule s’infectait, c’était encore une fois et toujours la faute de ce chien ! Seulement, si la carte qu’elle n’avait pas encore pu jouer ne la tirait pas de là, alors le résultat serait le même. Brûlée ou pendue, la mort finirait par l’arracher à sa misère.

Un sourire finit par naître au bord de ses lèvres asséchées. Imaginer le corps d’Alissart se balançant au bout d’une corde ne pouvait que la réjouir. Et si elle y mettait le feu alors que ses pieds s’agitaient encore. Double sentence, double souffrance, double plaisir. Quoiqu’elle devrait être celle qui activerait le levier pour faire tomber son corps et tendre la corde.

La lune illuminait toujours la pièce de ses traits fades lorsque des bruits retentirent dans le couloir. Sans doute un nouveau voisin ou un codétenu qui revenait d’un interrogatoire. Étrange, pensa-t-elle, aucun bruit de pieds que l’on traîne ni de cri affolé. Moelique sursauta lorsque des clefs jouèrent dans sa serrure.

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