Courbaturée et boiteuse, Mazy rallia la place où le combat avait eu lieu. Là où la presque totalité des villageois s’était massée. C’était elle qui avait exprimé ce désir, elle devait leur parler. Pour la première fois, de l’aide lui serait plus qu’utile. Ce simple détail raviva le malaise qui la tiraillait depuis le réveil, depuis que cette idée quelque peu fourbe l’habitait.
Elle sourit.
Voilà que le pouvoir de Garguyme la frappait. Alors qu’il avait disparu. Le deuil la secoua, elle réalisa qu’elle s’était attachée à cet homme, à ce dieu, à la fois frivole et irrespectueux de ses pairs, mais si salutaire. L’appui qu’il lui avait apporté demeurait précieux. Toutefois, Ourkess restait la cible de Mazy. Si elle agissait de la sorte, c’était pour attirer le guerrier immortel, pour qu’il l’accepte à ses côtés. Dès lors qu’il avait dépêché le soldat deux jours plus tôt, il avait avoué savoir qu’elle existait. Le premier véritable pas de Mazy.
Désormais, et si elle suivait les méthodes de Garguyme, elle progresserait plus vite. La première foulée est toujours la plus ardue.
« Merci à tous, dit-elle tout haut pour que sa voix porte. Comme vous le savez peut-être, c’est Ourkess, le dieu de la guerre lui-même, qui a expédié le colosse que j’ai combattu. Suite à cela, il s’est attaqué aux autres dieux. »
Mazy laissa le brouhaha qui suivit se tarir, puis elle poursuivit.
« Je sais qu’il est difficile de me croire sur parole. Qui suis-je, excepté celle qui a aidé les villageois d’Ogtour ? Mais aux yeux des dieux, moi seule peux arrêter Ourkess à l’heure qu’il est. »
Le bruit reprit de l’ampleur.
« Orgueilleuse ? Folle, vous dites ? Vous croirez peut-être la childa ! »
Celle qui pouvait écouter la parole des dieux fut prise pour cible. L’assemblée la fixa, chargée de curiosité et de désir.
« S’il vous plaît, poursuivit la guerrière, approchez-vous. »
Elle s’exécuta, mal à l’aise. Le poids de tous ces regards alourdissait ses épaules. Toutefois, arrivée au côté de Mazy, la childa se racla la gorge.
« Elle dit vrai. Armouth lui-même lui a parlé. Cela présage de sombres jours. Il semble qu’Ourkess veuille amorcer le terme des temps…
– Voilà pourquoi il faut agir ! attaqua la guerrière pour éviter tout effroi de la populace. Écoutez-moi, cette hache que je possède, elle m’a été offerte par Alij le Faiseur. Elle est capable de couper tout ce qui se propose à sa lame. J’ai battu le colosse d’Ourkess grâce à elle ! hurla-t-elle avec ferveur. Malgré tout, il me faut plus que de la force pour réussir. »
Elle laissa le doute flotter.
« C’est là que vous passez à l’acte, si vous le voulez. Pour réussir à attirer le regard du dieu de la guerre, à le fixer sur moi. Il faut que vous parliez de moi. Toutes les villes, tous les villages, toutes les bourgades, même les bâtisses isolées. Voyagez et dites à tous ce qu’il est arrivé ici, ce que j’ai fait à Ogtour. Poursuivez sur la voie ouverte par Garguyme ! »
Mazy laissa à l’auditoire le temps d’assimiler ses paroles.
« Pour ma part, je trouverai l’astuce qui me permettra de défier Ourkess. Cette hache est ma clef. Alors, que dites-vous de ça ?! »
