Avant de me mettre à écrire ce texte, j’avais une idée très précise du début. Puis je me suis laissé porter par le personnage, et par la situation dans laquelle il se trouvait, créant ainsi une histoire qu’il me plairait de reprendre, un jour, peut-être. La liste commence à s’allonger.
Le vent se leva dans la plaine, faisant onduler les herbes hautes tel un océan aux innombrables vagues chatoyantes. Les cheveux finement tressés d’Alissart battaient au rythme du zéphyr. Accroupi, il avançait à pas rapides en prenant garde de ne pas sortir la tête hors de la protection que lui offrait la verdure. Les hommes de la reine ne devaient pas être bien loin, et il n’avait aucune envie qu’ils le trouvent. Alissart levait nerveusement les yeux vers le ciel orangé, à intervalles irréguliers, lorsque l’horreur le frappa. Il stoppa tout mouvement pour se concentrer sur ce qu’il cherchait. La main au-dessus de lui pour se protéger du soleil aux lueurs bleutées, il regardait avidement de droite à gauche. Rien. Seuls quelques nuages venaient perturber le calme du ciel. Il regarda rapidement derrière lui. S’il ne bougeait pas bientôt, ses poursuivants allaient le repérer. Alissart ne pouvait cependant pas partir ainsi. Et si elle avait été touchée en plein vol ? Il ouvrit les herbes autour de lui et regarda dans toutes les directions.
Un petit cri retentit au-dessus de lui. Ce fut alors avec un grand soulagement qu’il aperçut enfin l’évilier. Seulement, s’il l’avait repéré, les hommes de la reine aussi. Son inquiétude avait repris le dessus. Oublieux de toute prudence, le petit rapace roux et blanc continuait de décrire de larges cercles dans le ciel, observant de ses yeux perçants les lieux pour Alissart.
Des hommes hurlèrent non loin de lui. Alissart jeta un coup d’œil par-dessus son épaule. Malheur, ils avaient repéré l’oiseau. Il porta les mains à sa bouche et, tandis qu’il agitait les doigts, une faible lumière naquit au creux de ses paumes. Puis, un puissant cri d’évilier retentit. Haut dans le ciel, le rapace vira sur sa gauche, observant l’humain et ses alentours. Alissart, conservant un œil sur son amie volante, reprit sa route au-travers de la forêt d’herbes.
Bientôt, l’évilier répondit à son appel, plia ses ailes et piqua à toute allure vers le sol. Alissart tendit son bras protégé par un gant de fauconnier et accusa le choc lorsque l’oiseau atterrit. Il lui caressa gentiment la tête avant de le propulser vers l’avant. Les plumes de l’oiseau virèrent alors du roux à un noir de jais, elles se lissèrent et se fondirent en une peau sombre. Ses ailes se plaquèrent sur son petit corps qui grandissait à vue d’œil, son bec s’aplatit, ne devenant qu’un fin trait sombre sur son visage. Lorsque la transformation fut achevée, ce n’était plus un évilier mais Éloare, la femme d’Alissart, qui se tenait devant lui.
Tout en expliquant la situation à son mari, Éloare couvrit sa nudité avec le manteau qu’il lui tendit. Trop d’hommes de la reine les entouraient, elle prendrait le temps de se vêtir plus tard. Elle enfila tout de même des bottes et dirigea le duo qu’ils formaient vers le Nord-Ouest.