L’héritage de Garguyme

Ce qui devait arriver arriva. Partout la folie sapait le cœur des hommes et des femmes. Même le plus réservé des chapardeurs élaborait des vols plus audacieux. La soif de pouvoir, la jalousie, le simple attrait, le vide au creux de l’estomac, le caprice. Voilà le type d’idées qui poussait les mortels à se laisser submerger par la fourberie désormais viscérale de Garguyme. Celui ou celle qu’elle attaquait se voyait trahi par ses propres rêves, coupable de faits parfois odieux, toujours perfides.

Armouth était le mieux placé pour suivre cette regrettable percée. Le vol exhortait plus que jamais le meurtre, tout comme le désir, ou les simples boutades. Le dieu se frotta le visage. Spectateur forcé, il déplorait les extrémités auxquelles pouvait aboutir même la farce la plus fade. La mort.

Toutefois, il sourit à l’idée que même trépassé, Garguyme réussissait à le titiller.

Aussi vite qu’elle était partie, la tristesse le submergea alors qu’il observait Mazy. Elle qui se proposait de secourir la populace, voilà qu’elle dépérissait depuis deux jours à l’ombre de cette geôle faite de bric et de broc . Le chef du village était ridicule. Elle seule aurait pu les sauver. Tous ! Les mortels comme les dieux. Armouth crispa les mâchoires.

« Que faire désormais ? souffla-t-il pour lui-même.

– Que faire, que faire ?! s’emporta Faraky. Tu oses te… Je… Il faut l’aider !

– Tu étais là, ma sœur. »

Armouth l’observa et hocha la tête.

« Je suis d’accord. »

L’immortelle écarquilla les yeux. Elle qui s’opposait la plupart du temps aux choix du dieu se voyait prise par surprise.

« Parfait, dit-elle pour retrouver sa fierté. Quelle est la marche à suivre ?

– Voilà à quoi je réfléchissais.

– Parfait », répéta-t-elle, très au fait d’avoir mal réagi.

Ce fut Mazy elle-même qui résolut le problème.

Alors qu’Armouth désespérait de trouver la meilleure méthode pour aider la guerrière, il la vit depuis la demeure des immortels percer les murs de sa cellule. Elle jura à tous les pillards, les voleurs et les meurtriers tout juste arrivés qu’elle seule survivrait au combat. Le chef du village aussi paierait sa traîtrise. Mazy cria haut et fort qu’elle s’élèverait. Et qu’elle sauverait peut-être les faibles, mais que sa hache goûterait à coup sûr la chair des perfides !