Le moral des dieux

« Regardez ! Regardez ! explosa Potéhète, le dieu des festivités et autres joyeusetés. Elle les a tués, tous les deux. Et avec quel éclat ! Vous avez vu, applaudit-il au bord des larmes, c’est beau. Là, bim, puis ici, avec sa hache. Roooooooooh, la tête de ces deux. Vous avez vu ? Il faut célébrer cette victoire !

– Cesse cela, veux-tu ? l’attaqua Jourtha, le maître du savoir. Défaire deux des créatures d’Ourkess reste dérisoire face à l’idée de s’opposer à leur roi. L’arrêter requerra plus de force et d’astuce à Mazy. Et beaucoup de hasard.

– Tu dis vrai, frère », appuya Mirta alors qu’elle triait les carrés de tissu où se prélassait autrefois Garguyme.

Elle bâtissait l’atmosphère idéale pour à la fois reposer le corps et laisser l’esprit travailler, par le jeu des couleurs et des formes.

« Ourkess reste l’être le plus fort. Plus coriace que chaque membre de cette assemblée, plus redoutable que les cruels barbares de l’Ouest et plus farouche que les loups d’Artim.

– Merci d’approuver, Mirta.

– Toutefois, cette femme, probable futur membre de cette famille, maîtrise l’art du combat. »

La déesse sourit lorsque le regard des huit autres immortels, rassemblés pour la première fois depuis des siècles, s’écarquilla.

« Vous aviez oublié que l’art va au-delà des statues, des tableaux et autres édifices ? Ou même de l’amour, précisa-t-elle pour sa sœur Faraky. Ou de la fuite. Et par cela, c’est vous tous que je vise. Il faut cesser ! Toute la famille doit appuyer la quête de Mazy, avec ses propres facultés. Gormo, tu as déjà débuté, tu l’as élevée au-dessus de ses semblables. Faim, soif, fatigue. Tout cela a été altéré.

– J’ai violé les règles pour ça !

– Et alors, si cela permet la victoire.

– Accroître l’ardeur et la vigueur de Mazy, c’est cela ? reprit Jourtha avec douceur. Pour qu’elle surpasse Ourkess. Cela paraît possible, après tout. Elle pourrait l’abattre et désamorcer le cataclysme actuel. Puis voler la place de l’être le plus fort de tous les royaumes et, si jamais semblable folie l’assaillait, créer le fléau ultérieur. Qui alors surgirait de ce chaos pour sauver le futur ?

– C’est le risque, c’est vrai, assuma Mirta. Mais le temps presse.

– Il suffit peut-être de cibler l’autre joueur. »

La voix de Potéhète calma les ardeurs. Le groupe des dieux rassemblés le fixa alors, dubitatif.

« Que veux-tu dire ? osa le maître du savoir et de la sagesse.

– C’est simple, au lieu de… »

Le palais céleste trembla de toutes parts, comme le reste des territoires terrestres. Puis tout cessa. La paix reprit ses droits. Piquée par la curiosité, la famille immortelle observa et découvrit avec surprise que l’armée d’Ourkess avait arrêté ses massacres. Rapatriée au cœur même de la demeure du dieu de la guerre. Véritable mur, elle se préparait à recevoir leur hôte de marque.

 

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