Le traître

488 mots ! Je me suis rapproché de mon but premier. Dans cette histoire, je voulais que le lecteur suive vraiment le personnage. Il devait s’imaginer marchant sur le tapis à la place du chevalier, et contempler ce que le héros voyait. Autrement dit, j’ai tenté de décrire la scène en suivant son regard :

Chacun tirant sur un anneau, les gardes ouvrirent l’immense porte à double battant de la Grand-Salle. Il suivit du regard le long tapis vert émeraude bordé de colonnes jusqu’au trône où, n’apparaissant que comme un vague point, le roi l’attendait. Il inspira profondément et, sans prêter attention aux gardes, il les dépassa et entama la longue marche qui l’attendait. Un calme pesant régnait sur les lieux, seul le son de ses pas venait répondre aux crépitements des torches fichées aux lourds piliers carrés. Égayant l’apparence austère des lieux, ils étaient couverts de gravures aux formes géométriques arrondies et colorées aux lueurs d’un arc-en-ciel. Telles des plantes grimpantes, elles avaient commencé à envahir le plafond.

La silhouette du roi commençait à s’affiner. Comme à son habitude, il était nonchalamment assis, son sceptre d’or posé sur son giron. Cependant, sa couronne semblait ceindre fièrement son front. Le froid régnant dans la Grand-Salle, un lourd manteau de fourrure couvrait ses épaules. Son pourpoint épais et ses bottes hautes d’un vert impérial se fondait avec le tapis. Le chevalier dut encore progresser pendant de longues secondes, dans un quasi-silence, avant d’apercevoir les dorures qui se dessinaient sur chacun des vêtements royaux.

Il s’inclina, la tête baissée, avant de ployer le genou face à son souverain, et entama d’une voix empreinte d’un profond respect :

« Votre Majesté, je me présente à vous sous le couvert de la honte. J’ai échoué dans la mission que vous m’aviez confiée, déplorant aussi la perte de la majorité des vaillants hommes mis à ma disposition. » Face au silence du roi, le chevalier continua. « Les défenses que nos ennemis ont bâties sont impénétrables. Leurs flèches transperçaient nos boucliers, brisant ainsi nos formations d’approche, la portée de leurs catapultes était bien supérieure à toutes nos armes de siège. Et, lorsqu’enfin, nous fûmes suffisamment proches, j’ai eu l’horreur de constater que leurs murs résistaient à toutes tentatives. La mort pleuvait tout autour de moi. » Il inspira profondément, et reprit, la tête encore plus basse. « J’ai ordonné le repli, nous ne pouvions rien faire. Mes hommes mouraient au pied des murs, transpercés par un trait, écrasés par des pluies de roches ou ébouillantés, sans qu’aucune échelle ne puisse être placée. Toutes nos armes de siège furent détruites bien avant que nous abandonnions l’assaut, et la retraite nous a coûté aussi cher que…

-Tu as échoué, intervint le roi sans une once d’émotion.

-Votre Majesté, vous devez comprendre que…

-Comment oses-tu me donner un ordre, traître ? Car c’est bien de cela dont il s’agit ! Je considère ton échec comme un acte de haute trahison. » Le roi attrapa son sceptre et frappa à trois reprises la pierre noire de son trône. Un pan du mur derrière lui s’ouvrit, laissant entrer quatre hommes de sa garde personnelle. « Tu sais quel sort je réserve aux traîtres Harribald. Messieurs, emmenez-le, je ne veux plus le voir. »

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