Bonus : souvenir d’Okrone

D’une démarche rigide causée par son manque d’assurance, il poursuivait son chemin vers cette fameuse porte où Il l’attendait. Deux hommes apprêtés pour le combat le surveillaient au bout du couloir, considérant chacun de ses pas. Okrone déglutit péniblement. Le bois grinçait anormalement fort sous ses pieds hésitants. Dans ce silence pesant, le plancher grondait comme un lourd orage d’été. Il s’attendait presque à recevoir une averse.

À la vue des étendards qui décoraient ponctuellement les murs, sa main se faufila inconsciemment jusqu’à son plastron. Les reliefs de la gueule de Chelgron, le tigre blanc rayé de bleu de la famille royale, glissaient sous ses doigts. Un mélange de fierté et de doute l’envahit. Méritait-il seulement l’honneur de porter un tel signe ? Son armure, d’une facture pourtant irréprochable, lui parut dès lors étroite. Son cou le démangeait, ses poumons, bloqués, refusaient de laisser entrer l’air.

L’un des gardes s’amusa fugacement de son malaise à son arrivée.

« Okrone est arrivé, déclara simplement l’autre.

-Et bien qu’il entre, répondit-Il de l’autre côté de la porte. »

Ainsi, l’un des guerriers lui ouvrit la voie. Avec l’impression de brûler de l’intérieur, Okrone entra dans les appartements. Un homme aussi simplement que richement vêtu se tenait penché sur son bureau. Il leva un doigt à l’attention du nouveau venu, continua d’écrire un instant, avant de se redresser. Tout le corps d’Okrone se tendit, et il se tint plus droit que jamais. L’homme frappa lourdement ses mains et se leva, un sourire franc aux lèvres, avant de le rejoindre. « Okrone, affirma-t-Il avant de lui attraper les épaules ! » Il l’observa un instant avant de lui enserrer l’avant-bras à la méthode des guerriers. « Je suis heureux que tu aies pu venir aussi vite.

-C’est-à-dire que, vous m’avez fait demander. »

L’homme sourit une nouvelle fois avant de se diriger vers un banc couvert de coussins aux multiples couleurs. « Viens donc t’asseoir.

-Bien.

-Arrête donc ça, souffla-t-Il. Prends une place et apprenons à nous connaître. Tu es un membre de ma garde désormais et je ne veux pas tant de distance. Donc, fais-moi plaisir, détends-toi et discutons. Tiens, si tu veux je vais commencer. Je me présente, Armok Chelgron, roi de cette belle contrée qu’est la Téroinie. Lorsque mes obligations m’épargnent un instant, j’aime profiter du vent et des rayons du soleil sur mon balcon. »

Revenant à la réalité, Okrone cessa de fixer le plafond et, caressant les cheveux de Moelique, il déclara simplement : « Il était comme ça. À dire vrai, tout était comme ça, à son image. La reine a beaucoup changé à sa mort. »

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