Le courroux de la guerrière

Les doigts serrés autour du bois de sa hache, le regard courroucé, Mazy attrapa le col du chef du village avec force. Elle l’attira si proche de ses mâchoires que l’homme dut reculer sa tête pour éviter de l’embrasser.

« Tu réalises que tu vas payer pour m’avoir traitée comme tu l’as fait. »

La voix de Mazy était froide, aussi affûtée que sa lame.

« Si je dois te croire, tu cherches de l’aide depuis des mois pour être débarrassé de ces petites frappes. Sympa, je cours et limite mes repas pour rappliquer aussi vite que possible. Pour que dalle, appuya-t-elle. Arrivée, je suis avertie que tu veux me voir. Pas d’accueil. D’accord, je réalise que le temps est compté, je me dépêche. Et là, malgré tout, tu m’offres à becter, à tous les coups sur le dos de tes villageois. Pourquoi ? Pourquoi ?! » répéta-t-elle les lèvres retroussées.

Mazy poussa sa prise, qui tomba avec lourdeur sur la terre battue.

« Je voulais juste…

– Pour quoi ?! » le coupa-t-elle.

Puis elle reprit avec calme :

« Me droguer et me pousser derrière des barreaux. Me troquer et espérer te débarrasser de ces pillards. Ça peut paraître logique. Pas judicieux, mais logique. Ma foi, sache que tu as fait erreur ! clama-t-elle. Tu as parié sur le mauvais cheval. Et tu vas payer pour cela !

– Pitié, je…

– Pitié ? Dois-je me répéter ? »

Sa voix était implacable :

« Tu m’as trahie ! »

Mazy attrapa le pauvre bougre par la peau du cou et le força à se relever. Sourde face à ses prières désespérées, elle le poussa vers la réserve de bois du village. Là, elle le frappa derrière la jambe pour l’obliger à poser la tête sur le billot improvisé.

« Qu’allez-vous faire ? Pitié !

– J’accorde l’aide à celui qui l’implore, pas la vie ! »

Vive comme l’éclair, la guerrière abaissa le bras. Ce fut tout. La tête du chef du village roula au sol.

« Vous autres, hurla-t-elle pour l’assemblée, vous vouliez que je tue la troupe de voleurs. C’est chose faite. Pour ce qui est du corps à côté de moi, sachez qu’il vaut mieux éviter de me déplaire, ou pire, me tromper. Vous pouvez exposer ce qu’il s’est passé ici, avertissez tous les villages que je serai votre bras armé, ou votre bourreau. »

Mazy savoura le calme qui suivit sa tirade, les yeux clos. Sa hache, habillée de frais de liquide écarlate, gouttait avec paresse. L’air du soir glissa parmi ses cheveux de feu et charria la poussière.

La guerrière rouvrit les paupières, décidée. Tout cela avait trop duré ! Secourir les villageois, faucher les voleurs et autres abrutis trop zélés. Espérer que sa geste se propage. Elle avait plus qu’assez respecté l’idée de Garguyme, pour mettre de côté ses propres désirs. Mazy devait suivre sa méthode. Peut-être que cela la ferait reculer, mais peu importait.

« OURKESS ! hurla-t-elle vers les cieux. Puisse ce bourg l’affirmer aux yeux de tous, je te défie ! Approche, ou reste caché au cœur de ta forteresse, lâche. »

L’écho de sa voix mourut petit à petit pour disparaître tout à fait. Seule la paix prit place.

Puis le ciel s’obscurcit.

 

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